Qu’as-tu fait avant ? Pourrais-tu nous parler de les raisons qui t’ont données envie de rejoindre Teach for Belgium ?

J’ai fait un bachelier pour être professeur de français en haute école et j’ai ensuite fait un master en sciences de l’éducation. J’ai toujours voulu enseigner dans les milieux défavorisés. A vrai dire, je pensais d’abord aller enseigner à l’étranger car c’est le moment de le faire lorsque rien ne nous rattache encore à la Belgique. Globalement, depuis le début de mes études supérieures, cela a été une évidence pour moi de travailler dans le secteur de l’éducation.

Je pense que la plus-value du programme Teach for Belgium pour les gens comme moi qui ont déjà fait des études dans le but d’enseigner, c’est surtout le soutien entre « jeunes enseignants » avec un public difficile. On partage nos joies, victoires et frustrations par rapport au système scolaire tel que nous le voyons. Les outils et formations me permettent d’avoir un gros rappel de mes années en haute école. Le suivi offert par Teach for Belgium est beaucoup plus personnel. Grâce à l’entrainement lors de l’académie d’été, le soutien des tuteurs et le feedback reçu tant en été que pendant l’année scolaire, je peux m’améliorer directement sur le terrain. Les tuteurs sont impliqués et se rendent très disponibles pour nous, ils nous partagent leurs expériences et idées pour rendre nos cours toujours plus efficaces auprès des élèves afin d’atteindre la réussite de 100% de nos élèves.

Quelle matière enseignes-tu aujourd’hui ? Comment décrirais-tu ton expérience en tant que francophone dans une communauté néerlandophone ? Comment vis-tu la frontière linguistique ? 

Aujourd’hui, j’enseigne le français en communauté néerlandophone. Je n’avais pas un bon niveau de néerlandais au départ mais je m’améliore grâce à l’expérience. Mes collègues ne veulent pas que je parle français en dehors de ma classe comme par exemple dans les rangs ou à la cour de récréation car la plupart des élèves sont francophones et les autres professeurs en ont marre d’entendre du français tout le temps. Il y a un cadre à respecter mais je trouve  difficile d’avoir des conversations avec les élèves et d’entretenir une relation avec eux si je ne peux pas m’exprimer dans ma/leur langue maternelle.  Ce qui est important pour moi, c’est que mes élèves s’expriment en français sans inclure des insultes dans leur discours. Lors des réunions avec les parents, je parle français et me sens donc valorisée dans ce que j’amène à l’école car les parents s’expriment plus facilement en français.

Globalement, au fur et à mesure que je m’intègre, tout le monde est de plus en plus ouvert. J’ai été bien accueillie au sein de cette communauté néerlandophone, je m’estime chanceuse car d’autres écoles peuvent se montrer remontées contre Bruxelles qui est principalement francophone.


Quelle était ta vision ou ta perception de ta mission avant de faire Teach for Belgium?

Depuis toujours, j’ai voulu être prof. Les milieux difficiles m’ont toujours intéressées, j’ai d’ailleurs été chef chez « vacances pour tous » qui accueillent des enfants du juge. J’ai toujours souhaité avoir un rôle social à jouer.

Je comptais commencer mon métier d’enseignante dans les écoles dites « faciles » pour acquérir de l’expérience ainsi qu’une bonne notion de ma matière. Je voulais être sûre de moi avant de me lancer vers un public plus challengeant. Mais au final, quand j’ai vu que Teach recherchait des professeurs de français, je n’ai pas hésité. Même si je stressais avant de commencer l’expérience, je me suis dit qu’avec le soutien de Teach, tout était réalisable.


Le programme t’a il aidé dans certains domaines de vie ?

Teach for Belgium me permet de partager ce que je vis avec un entourage qui comprend le contexte (les participants teach, le support du programme, les tuteurs).  C’est très agréable de faire partie d’un réseau et de connaître d’autres personnes qui comprennent et vivent les mêmes défis. L’expérience nous permet d’ouvrir les yeux sur les réalités de Bruxelles et sur le fonctionnement des milieux différents des nôtres. On se sent également capables, voire responsables, d’expliquer ce contexte à des personnes extérieures pour lesquelles ces milieux sont accessibles uniquement via le biais des médias. Enseigner dans des écoles à indice socio-économique faible nous permet de conscientiser la réalité du terrain.

Qu’as-tu envie d’accomplir par après ? Quels sont tes projets pour le futur ?

Il faut mettre beaucoup de choses en place pour pouvoir assurer un suivi de chaque élève et leur permettre d’avoir des chances égales de réussir plus tard. Je pense que l’école a un rôle social immense à jouer, pas uniquement éducatif.

Par exemple, l’école sert régulièrement de relais/médiateur entre les familles et la police ou les services sociaux.

La réalité et le quotidien des élèves font qu’ils ne sont pas toujours disponibles pour apprendre car ils vivent des choses atroces et trop intenses en dehors de l’école. Mon but est de leur faire réussir leur année malgré les circonstances. C’est important de leur donner un bagage suffisant que pour sortir de l’école avec des notions malgré leur situation.

Dans plusieurs années, j’ai toujours le projet d’enseigner le français à l’étranger. Grâce à Teach for Belgium, j’ai déjà un aperçu des différents systèmes éducatifs dans d’autres pays d’Europe. Par exemple, la semaine prochaine, quatre enseignants (d’Autriche, Allemagne et Danemark) viennent loger 4 jours chez moi et découvrir mon école. Ces différents « échanges » entre enseignants de plusieurs pays nous permettent de constater qu’aucun système n’est parfait pour le moment, et de réfléchir aux améliorations possibles.

Auriane, Master en sciences de l’éducation, désormais professeur de français en communauté néerlandophone

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