Quels sont les bons ingrédients pour faire un bon professeur ?

Quels sont les bons ingrédients pour faire un bon professeur ? Comment faire grandir l’envie d’apprendre ?

À l’école, tout dépend du professeur.

L’affirmation est simple et elle se confirme dans les souvenirs de chacun. Camus, ayant reçu le Prix Nobel de Littérature, remerciera son instituteur, monsieur Germain :“Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j’étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé.”

S’il ressort de beaucoup d’études que l’enseignant a une influence sur les résultats scolaires des élèves ; il apparaît dans les mêmes études que les variables les plus utilisées : expérience, salaires, certification, niveau d’étude… expliquent très peu la variance des scores des élèves. Quels sont alors les bons ingrédients pour faire un bon professeur ?

Celui qui enseigne est presque toujours un ancien bon élève très doué dans la matière qu’il enseigne aujourd’hui. Le passionné de littérature donne le cours de français, le roi du théorème est professeur de mathématique. Ces “bons enseignants” trouveront facilement les bons mots pour enseigner ces matières aux élèves qui leur ressemblent. Les “bons élèves” seront valorisés, s’ils sont majoritaires dans ses classes, nous aurons un professeur heureux et une classe qui lui apportera la reconnaissance qu’on donne au “bon maître”.

Les élèves en difficulté seront encouragés à faire des efforts. Ceux qui n’y arrivent pas seront considérés comme peu doués ou comme fainéants. On suppose qu’un élève qui investit du travail dans une matière devrait, dans la majorité des cas, réussir. C’est méconnaître que la réussite précède souvent l’effort. La carotte est plus puissante que le bâton. Pour encourager l’élève, il faut donc un enseignant qui le comprend. Enseigner, ce n’est pas préparer un cours qui satisfait le professeur, ce n’est pas expliquer une matière, c’est veiller à ce que l’élève comprenne et apprenne et y prenne plaisir.

L’approche pédagogique devrait donc primer. Aujourd’hui, les deux sont demandés au professeur. L’approche pédagogique est cependant toujours seconde. On y consacre moins de temps pendant la formation. Si, pénurie oblige, on doit engager quelqu’un qui n’a pas la formation complète, on sacrifiera la formation pédagogique. On verra un mathématicien engagé pour donner cours de mathématique, on lui demandera de se former en pédagogie, on n’engagerait jamais un pédagogue en lui demandant de se former en mathématique.

Il faut cependant aussi savoir ce qu’on fait de ces connaissances. Donner cours, c’est avoir le souci de faire en sorte que l’autre se l’approprie. La pédagogie active, la pédagogie différenciée, les classes inversées, tout cela peut aider, mais ce n’est pas suffisant.

Et si on changeait la perspective ? Être enseignant, c’est se donner la mission de faire réussir l’élève. Ce n’est pas avilir le cours en le simplifiant, l’élève adore le défi si on lui donne le moyen de le relever. Conseiller des méthodes de travail, donner des moyens pour améliorer la mémoire, mais surtout, donner l’exemple. Comment faire venir l’envie d’apprendre si ce n’est en étant soi-même enthousiaste. Le mot est dit : “enthousiaste”. Ce ne sont pas des mercenaires dont l’enseignement a besoin, mais des révolutionnaires. Des adultes passionnés qui ont la Foi dans ces jeunes qui leur sont confiés. Cet autre regard ne rend pas inutile la connaissance de la matière, ne rend pas une bonne formation pédagogique secondaire, ce changement de perspective rend ces compétences actives.

Monsieur Germain était-il vraiment un bon professeur ? Il a réussi à faire un prix Nobel de littérature, mais il avait Camus dans sa classe ; diront les plus sceptiques. Et s’il suffisait d’y croire pour révéler plus de Camus ; s’il suffisait que chacun de nos profs décide de voir dans ses élèves de futurs Camus. Tout est peut-être dans cette petite phrase de Camus qui remercie un homme de lui avoir tendu la main alors qu’il était pauvre ; de lui avoir servi d’exemple.

Cet article a été publié le 29 avril 2019 dans le cadre d’un column pour le journal La Libre
Bernadette Devillé, directrice de l’Institut Don Bosco à Woluwe-Saint-Pierre et membre du conseil d’administration de Teach for Belgium. 

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