Rien de mieux qu’une bonne action pour une petite évasion !

Cette semaine marque la sixième semaine en confinement. J’aimerais la terminer en beauté par un hommage particulier à tous mes élèves qui se battent depuis le début de ce « lockdown » et mettre en lumière à quel point ce ne sont pas eux qui ont la chance de m’avoir comme professeur mais moi qui ai la chance de les avoir comme élèves. Petit retour dans le passé : vendredi 20 mars, la nouvelle est tombée la veille : les cours sont suspendus. J’ai devant moi des élèves contents et en même temps un peu nerveux. Je pense qu’ils ne réalisent pas encore trop, comme moi, vers où on va. Ils parlent de vacances, je leur annonce que pour moi ils vont quand même devoir travailler l’équivalent de nos 4 heures en néerlandais. Quelques élèves rouspètent (je les comprends, ils ont des « vacances » gratuites et voilà que leur professeur leur annonce du boulot… qui plus est en néerlandais). Les rouspétances se transforment vite en question et je leur expose mon programme : 2 compétences par semaine et un envoi à me faire chaque dimanche. La dernière heure sonne. Heure très compliquée, mais je vous pardonne les gars, je ne sais même pas comment j’aurais réagi à votre âge. Bref, le confinement commence. Et les contacts virtuels aussi. Une élève m’envoie régulièrement un message disant « Aujourd’hui on aurait du être en excursion avec vous ». L’école lui manque. Moi aussi. Je reçois les premiers travaux par mail ou WhatsApp, chacun des élèves me demande de mes nouvelles, beaucoup se permettent de me relancer quand je ne leur donne pas des nouvelles sur mon état. Commencent les petits tracas et les questions ciblées : Comment s’organiser pour l’école avec les petits frères et petites sœurs à garder, la cuisine et le ménage (qui a doublé) à faire ? Comment ne pas trop se décaler dans son horaire de sommeil ? Comment vaincre l’ennui et ne pas tomber dans la routine ? Comment faire une mise en page dans un document Word ? Comment ne pas devenir fou/folle dans un petit appartement sans autorisation de sortir ? S’y ajoutent de plus gros tracas : un élève qui se fait mettre à la porte de sa maison, les premiers élèves touchés par le Coronavirus. Pas d’ordinateur, pas de Wifi. Comment continuer à travailler pour l’école dans ces conditions là ? Et pourtant, les travaux ne cessent d’entrer. Je suis tellement fière du boulot effectué que je partage certains des travaux avec mes amis, ma famille. Ils sont quand même top mes élèves ! Les travaux, justement, je ne vous ai pas encore raconté les fou-rire que j’ai eu en voyant un élève présenter sa chambre, une élève qui chante une chanson en karaoké avec sa grande sœur et leur bébé frère avec des yeux ébahis. Ou encore le « JT des bonnes nouvelles » et les nombreuses recettes de cuisine. Tout ça en néerlandais, natuurlijk ! Je commence à mettre un point d’honneur à prendre des nouvelles de mes élèves, me rendant enfin compte à quel point ils sont courageux et mènent la vie dure dans ces conditions. Arrivent les premières décortications de l’actualité « Le virus a été créé dans un labo par les chinois, Madame » « Ce qui est arrivé à Adil, ce n’est pas normal, c’est toujours aux mêmes qu’on s’en prend. ». On prend le temps de vérifier les sources, je me fait l’avocat du diable, et on en ressort tous les deux grandis. Ensuite arrivent les vacances, avec un photomontage créé par mes collègues et moi. Les élèves sont émus « Madame ça fait trop plaisir ». On reçoit même des photomontages en retour, mon compte Instagram est inondé de commentaires positifs, de likes et je reçois des propositions de follow d’anciens élèves. Mes anciens élèves, justement, en première année à la Haute Ecole et l’université, qui se retrouvent bombardés de présentations Powerpoint, de chapitres de cours à étudier de manière autonome. Les « cours à distance » dans le supérieur ne sont pas ce que l’on croit. Mais ils s’en sortent tant bien que vaille et ont la maturité de venir me poser des questions et à collaborer entre eux pour y parvenir. Le prolongement du confinement est annoncé : « Madame je suis inquiet(e) pour la fin de l’année ». « J’ai peur ». On essaye tant bien que mal de rassurer, tout en leur montrant l’importance de continuer le travail à distance. Et puis, après les vacances, je leur annonce deux nouvelles tâches : un défi à lancer à un élève qu’ils ne connaissent pas (je me charge de choisir à qui je donne ce défi) et une Bonne Action (B.A.) à effectuer dans la semaine. Gros stress au début de leur part et de nombreuses questions. Je me permets de l’interpréter comme une peur de l’inconnue et surtout une peur de ne pas y arriver (et pourtant, ils me prouvent le contraire !). Et puis les B.A. commencent à entrer, et je me rends encore plus compte à quel point mes élèves sont EXTRA-ordinaires car nombreux sont ceux qui font déjà des Bonnes Actions journalièrement pour des personnes âgées, pour leurs voisins, pour la famille, … Bon, je vous laisse, j’ai 129 mails d’élèves extraordinaires à éplucher et un message d’un élève sur la rentrée potentielle le 18.

Fiona Buidin

P.S. : Si vous me lisez, Madame Buidin est fière de vous et vous aime!

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