Il faut oser sortir de ces prisons dorées

Olivier L'Echo

Publié le vendredi

Jamais il n’aurait imaginé raconter cette histoire-là. L’histoire de son parcours professionnel qui renaît en septembre dernier. Olivier a alors 29 ans. Il travaille dans le privé. Un jour d’été, il quitte l’open space pour le théâtre de la salle de classe. Pour le meilleur et pour le pire. Mais surtout pour le meilleur.

Ça a commencé ainsi. “J’ai étudié à l’ICHEC, à Bruxelles, pour devenir ingénieur commercial. Pourquoi? Je ne sais pas très bien”, raconte-il d’emblée, la voie douce et un peu intimidé. Il n’a pas l’habitude de s’épancher. “À 18 ans, personne ne sait ce qu’il rêve de faire comme métier. Encore moins de devenir contrôleur de gestion. Je me suis immiscé là-dedans, en pensant avoir des débouchées rapides.”
Il voit juste. À peine diplômé, il obtient un premier poste d’analyste financier chez Bain & Company, au dernier étage de la tour du numéro 326 de l’avenue Louise. “J’avais 24 ans. J’en ai pris plein la vue. Tout était attractif: le salaire, les bonus, les voyages… J’ai bossé dans un super environnement de travail. Un environnement tellement incroyable qu’on a dû mal à s’en détacher.” Une sorte de prison dorée bien pensée pour “éviter que leurs employés ne partent chez McKinsey ou BCG.” Mais trois ans et demi plus tard, il claque la porte. Et il enchaîne les boîtes: chez GSK d’abord avant d’atterrir en juillet dernier chez Alpega, un important concepteur de logiciels de logistique dans le monde. “C’est là que l’enfer a commencé”. Là aussi que sa vie professionnelle a basculé.
Dès son embauche, les tensions avec son supérieur direct se sont révélées toxiques au point de lui être nuisibles. Jusqu’au jour où il lui dit clairement lors d’une réunion: “Tu devrais être motivé à l’idée que moi j’aie mon bonus”.” Il en ressortit groggy. “J’avais l’impression de travailler pour le bonus d’un autre.”
Quelques jours plus tard, il accompagne sa femme enseignante dans une école de discrimination positive. “J’ai eu un chouette échange avec les enfants. Je leur ai notamment demandé ce qu’ils voulaient faire plus tard. Certains m’ont répondu: comptable. Je leur ai expliqué mon profil, mon parcours et ces prisons dorées.” Cet épisode va lui permettre de voler de ses propres ailes. Il postule chez Teach For Belgium, une ASBL qui recrute divers profils pour se lancer dans l’enseignement qui lutte contre les inégalités. Il suit une formation et, quatre semaines plus tard, en septembre dernier, il vit sa première rentrée des classes au collège jésuite Matteo Ricci. “Aujourd’hui, j’aime ce que je fais. Et pourtant, je bosse plus que dans le privé et je gagne 900 euros net de moins.”

Une dernière leçon. “Les gens imaginent qu’on est des planqués et qu’on est en congé toute l’année. Or, c’est l’inverse. Je travaille plus que lorsque j’étais chez Bain & Company. Mais ma force est que j’ai le droit d’avoir un avis puisque j’ai bossé dans le privé, je peux me permettre de comparer.” Mais ça, c’est une autre histoire à raconter.

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